lundi 29 août 2011

Marcher

C'était notre projection, c'était son faire-part ...

Nous nous demandions comment lui donner le goût des randonnées, l'envie de marcher, de découvrir les beautés de la nature au rythme le plus lent. Je pensais déjà au chemin de Stevenson alors qu'elle n'était pas encore née.

Six ans plus tard, chaussés de nos godillots (celui de la photo !), nous avons parcouru quelques chemins gaumais aux alentours de Chiny, heureux d'emmener Solène, notre petit kangourou pour une petite mise au vert avant la rentrée scolaire ... à moins que ce ne soit un pélérinage en souvenir de notre randonnée (la transgaumaise) réalisée en 2002 ? Nous aimons cette région, ses paysages variés, les maisons en pierres de France (jaunes), la Semois.

Pour l'éloge de la marche, il faut lire Marche avant d'Alexandre Poussin. Avec Solène, nous ne sommes pas dans l'introspection. Nous partageons un moment d'enthousiasme, elle saute, elle court devant, derrière nous. Nous nous réjouissons des petites découvertes : un champignon, un oiseau, une fleur. Le mot "fougère" a fait l'objet d'un jeu ... Nous lui désignions la plante plusieurs fois en quelques minutes, en riant ... Au début de la première promenade, ce mot se perdait dans les méandres de sa mémoire et ressurgissait après quelques secondes. A la fin, elle prenait l'initiative de nous les montrer !

Rien d'extraordinaire, un plaisir sain pour clôturer les vacances d'été.

lundi 22 août 2011

Les alphas sont nos amis


La planète des alphas est une méthode de lecture ludique. N'est-ce pas génial d'apprendre en s'amusant ? J'ai été confortée dans cette idée lorsqu'en juillet 2010, une enseignante de Bruxelles, en contact étroit avec les concepteurs a témoigné de son expérience de plusieurs années avec des élèves de 1ère année primaire, parfois en difficultés. Elle parlait avec un enthousiasme inégalable des résultats obtenus, de la fierté des enfants et du plaisir partagé à chaque étape de l'apprentissage de la lecture.

Le point de départ, c'est un conte. Il donne vie aux sympatiques petits alphas pourchassés par la sorcière Furiosa et ses stupides bêtas. L'histoire se  prolonge avec des petits jeux et des devinettes suggérés à chaque étape de la méthode, laissant un grand champ libre à l'imagination des enseignants.

J'ai démarré avec le matériel de base. Nous avons regardé le dessin animé plusieurs fois, raconté l'histoire dans le livre, écouté le CD. Solène a adopté les alphas très rapidement. Je lui donnais une figurine par jour en la glissant chaque soir sous son coussin. Elle la découvrait avec joie le lendemain matin. Puisque Furiosa risquait de les capturer, il fallait absolument les ranger dans une boîte bien fermée !

Quelle chance de pouvoir manipuler les lettres ! Je devais en même temps veiller à la relation que développait Solène avec ses alphas, autrement dit, veiller à ses attaches dans le monde réel. Solène rêvait de rencontrer les "vrais" alphas ! Il fallait éviter un attachement trop envahissant.  Elle sait maintenant très bien qu'ils n'existent pas.

Aujourd'hui, nous pouvons lire (faire chanter) les alphas isolés et commencer la syllabation. Je me rends mieux compte que Solène entend parfaitement bien les phonèmes (sons) mais ne parvient pas toujours à les articuler correctement. Par exemple, elle voit, elle entend "é" mais prononce "è".

Nous parlons aussi des alphas transformés (lettres), c'est la suite du conte. Je n'ai pas la prétention de lui apprendre à lire mais je voulais prendre le temps de construire un petit tremplin. Les alphas seront utilisés cette année en classe, combinés à une méthode mimo-gestuelle, pour maximiser les aides visuelles.

jeudi 11 août 2011

Poules, moutons, lapins, canards, cochons, ...

La ferme Schalenbourg à Haneffe, je l'ai découverte aux hasards de mes recherches sur Internet, en février 2010. La réponse à ma demande de renseignements était précise et emprunte d'attention. Après un contact téléphonique et une première rencontre, nous n'avons pas hésité à leur confier Solène pour un premier stage, à Pâques, l'an dernier.

Nous avons préparé Solène en lui proposant des livres mais aussi en lui montrant le DVD "Une journée à la ferme" des éditions Montparnasse, loué à la bibliothèque. 

Solène s'y plaît. Elle a choisi d'y fêter son 6ème anniversaire avec les copains de classe, à la fin du mois de juin et vient de terminer son 4ème stage. L'apprentissage des soins aux animaux, la dégustation des produits de la ferme (oeufs, crêpes, omelettes), les promenades dans la remorque du tracteur et les chasses aux trésors font partie du programme. Solène adore particulièrement les poules. Elle n'en a absolument pas peur pour oser les attrapper les caresser et ... les embrasser ! (beurk)

Des activités saines dans une belle grande ferme, une équipe d'encadrement expériementée, de l'organisation et de la discipline, que rêver de mieux ? De stage en stage, les progrès de Solène sont remarqués et nous sont rapportés, ça nous fait immensément plaisir ! Cette fois-ci, par exemple, durant les périodes de récréation, Solène jouait avec deux autres garçons.

mardi 9 août 2011

Et après, et après, ... ?

"Et puis, on fait quoi ?"
"C'est midi ?"
"Et demain ? Et après ?"
Je pense qu'elles figurent au top 10 des questions les plus posées par Solène. Ces questions reflètent, selon moi, quelques éléments caractéristiques de ses troubles.

Elle a beaucoup de difficultés à se situer dans le temps. Cet apprentissage est une étape naturelle dans le développement des enfants mais je crois que Solène doit fournir un effort supplémentaire pour avoir des repères élémentaires, par exemple, savoir si, c'est le matin, l'après-midi ou le soir. Récemment, elle voulait une confirmation de ma part sur l'exactitude d'un petit tableau mental qu'elle me récitait : le petit-déjeuner, c'est le matin, le dîner, c'est à midi et le souper, c'est le soir. Dans un premier temps, nous avons utilisé un journalier magnétique sur lequel on dépose chronologiquement les images représentant les activités prévues. Grâce au semainier, affiché devant elle lorsqu'elle est assise à table, elle sait maintenant se situer à l'échelle de la semaine. Comme si elle y avait réfléchi pendant la nuit, elle est arrivée dans notre chambre, dimanche matin en déclarant : "aujourd'hui, c'est dimanche et demain, c'est lundi !". Encore une petite victoire ! Les saisons, les grandes fêtes, les mois des anniversaires permettent aussi d'associer une image ou un événement marquant à un mot qui n'est à priori, pas significatif.

Vivre avec des repères temporels instables est source de tensions et d'angoisses qui se manifestent, chez Solène, à travers un sommeil très troublé quand elle était plus jeune, moins troublé maintenant, des tas de questions "Quand ... ?" et de l'agitation. Je continue à lui donner le planning, à le détailler quand c'est possible. 

Solène a tendance à se précipiter pour agir, jouer, parler. Comme si tout se passait à la vitesse de l'éclair dans sa tête : les mots et les idées s'y bousculent, les gestes sont à peine conçus. Elle vit toujours un peu en avance, dans la minute suivante. Elle en oublie parfois ce qu'elle est en train de réaliser ou ce qu'elle doit faire. Je dois régulièrement lui dire qu'elle n'a pas terminé son "job" quand elle va aux toilettes, parce qu'elle oublie d'éteindre et de fermer la porte en sortant. Chaque "problème" doit être décomposé explicitement, en une séquence de tâches plus simples. Ce dernier paragraphe illustre les troubles dysexécutifs, bien expliqués dans la vidéo du Dr Pouhet. 

samedi 6 août 2011

Hé, ma copine !

En éthologie, on apprend que tout animal organise autour de lui un espace personnel qui correspond à sa zone protection (bulle). Le respect mutuel de cet espace est une condition nécessaire pour communiquer correctement, de manière agréable. J'expérimente régulièrement l'envahissement de ma zone personnelle quand je suis à côté de mon cheval. Je dois reconnaître que c'est très désagréable, agaçant, parfois douloureux (morsures) si je suis inattentive.

La comparaison est peut-être un peu exagérée mais je comprends très bien que certains enfants soient surpris lorsque Solène les aborde. Il arrive qu'elle initie un échange verbal avec un enfant qu'elle voit pour la première fois, en s'approchant trop près de son visage. Solène aime les contacts physiques, elle a envie de toucher ou caresser les enfants plus jeunes, dans un élan protecteur. C'est mignon mais pas forcément bien perçu ou interprété. Lors de réunions familiales, elle est tellement contente de revoir ses cousins qu'elle veut les prendre dans ses bras. Le jour de la fête d'anniversaire du petit S., "son prince charmant" de 3ème maternelle, elle n'avait pas résisté à l'envie de le serrer dans ses bras en arrivant au seuil de sa maison.

Au langage corporel encore mal maîtrisé, s'ajoutent bien-entendu, les problèmes de langage verbal. L'élocution de Solène est soit trop rapide soit trop hésitante. Les questions qu'elle pose déstabilisent les autres enfants. A n'importe quel moment de la journée, elle peut demander s'il a bien dormi . Elle enchaîne en parlant de la composition du dernier repas. En réalité, elle doit apprendre à initier le contact avec les autres, sans brusquerie, en posant des questions plus adaptées.

Sur la photo, Solène est en "grande conversation" avec une petite voisine venue passer quelques jours de vacances chez sa mamy. Elle était à l'affût, près du grillage, curieuse d'entendre une petite voix dans l'autre jardin. Elle a interpellé l'enfant par un "hé, ma copine !" et a entamé son interrogatoire. Tu fais quoi ? Comment (tu) t'appelles ? Et ta maman ? Et tu vas faire quoi ?

Sans freiner son envie d'entrer en contact, nous essayons de lui expliquer ce qu'il faut dire, ce qui n'intéresse pas les autres enfants, ... Nous avons encore du boulot de ce côté ! En grandissant, j'espère qu'elle pourra entrer dans une vraie relation amicale avec d'autres enfants. Je me demande parfois si ce ne sera pas plus facile lorsqu'elle sera entourée d'enfants qui vivent eux-mêmes des difficultés ?

mercredi 3 août 2011

En stage

Cette année, nous expérimentons un rythme d'activités qui nous paraît équilibré : une semaine de stage suivie d'une semaine de repos. Le mot "repos" a un sens particulier pour nous, il signifie qu'il n'y a pas d'activité intensive prévue, en continu, pendant 5 jours ! La logopédie est suspendue pendant les stages mais le travail systématique d'orientation spaciale, de repérage et d'organisation ne peut absolument pas être oublié pendant les deux mois de vacances. Maudite dyspraxie ...

Fin juillet, Solène a enfilé un judogi, histoire de travailler son équilibre et de respecter les consignes et règles d'un art martial que nous ne connaissons pas mais que nous aimerions découvrir. Nous voulions lui ouvrir une nouvelle porte, tout en prenant les précautions d'usage, résumées cette fois à un simple contact préalable avec le moniteur qui visiblement semblait savoir de quoi je parlais. Des enfants "dys", il en avait déjà accueilli au club. Tant mieux !

Solène garde un bon souvenir du judo. Elle y arrivait ! Par contre, les échecs répétés lors de l'activité "basket" l'ont rendue triste, au point d'en pleurer ... Les sports de balles/ballons ne conviennent pas à tout le monde, encore moins aux enfants dyspraxiques. Dans son cas, attraper un ballon en mousse à plus de deux mètres de distance reste toujours un défi. On s'entraîne en s'amusant, en alternant les lancers, les positions. Pour la consoler, nous lui avons dit qu'elle avait le droit de ne pas aimer le basket. Elle peut préférer la natation ou l'équitation ou le judo, ... J'avoue que sa tristesse m'a pincé le coeur mais au même moment, je préfère qu'elle affronte son échec de cette manière plutôt que de le fuir, comme auparavant, en se retranchant dans son "ailleurs".

Si l'horaire le permet et si l'agenda hebdomadaire n'est pas trop chargé, nous pourrions même envisager de poursuivre l'apprentissage du judo dès le mois de septembre. Sur papier, tout est (presque) possible, en pratique, il faudra tenir compte de la fatigue induite par le changement d'école.